Qu’est ce qu’un bon vendeur ?

20 ans que pour des raisons familiales nous allons à Argeles Sur Mer. 20 ans que nous voyons le même vendeur de plage à la technique ultra rodée. 

Le bon sens en action

Reconnaissable entre mille, Hakim à un Lycra bleu ou jaune, très visible. Il a également un haut-de-forme « à la slash » (principe de sympathie). Enfin, i arbore un duo chaussette / crocs pas forcément sexy mais très efficace pour affronter les 400 m de plage qu’il arpente au quotidien, le plateau calé sous le bras. 

Mono produit 

Il ne vend que des pralines. Pas d’eau, ni de beignets, ni de glace. Pas de diversification hasardeuse, pas de nouveau produit. De bonnes pralines : soit de la cacahouète enrobée de sucre. Un sachet en cellophane bien classique. Cela dit, si la praline devenait létale, il pourrait proposer, maintenant, un autre produit. C’est la confiance et la technique qui font son succès.

2 tarifs

3€ le sachet moyen / 5€ le grand sachet. Pas plus compliqué que cela. Pas de négociation. 

Jusque là, tu vas me dire : ok et alors ?! Des vendeurs de plage, il y en a partout. Pas un métier facile (plein cagna, marcher dans le sable, c’est dur et ça fait les abdos). Pas de quoi faire une chronique. Et bien si ! Parce que le garçon maîtrise son art… depuis 30 ans

Il passe et repasse toute l’après-midi et il a technique très très étudiée.

Tout d’abord le matin il passe sur chaque serviette et dépose 3/4 pralines avec un petit sourire et en disant bonjour.

Il enclenche ainsi le principe de réciprocité : tout le monde trouve cela sympa, il crée un rapport.

Ensuite il repasse et il a …. une clochette.

Tu vas trouver cela gros. On est dans du Pavlov… et CA MARCHE.

J’en ai parlé avec lui, il m’a dit que sa fille avait essayé sans clochette et que cela marchait beaucoup moins bien.

 Ce qu’il propose est simple, et de confiance. 

En résumé 

  • Un seul produit, simple et bon. 
  • Une signature visuelle (le chapeau + le lycra)
  • Un signature sonore (la cloche)
  • Une clientèle récurrente (repeat business de 2 jours, à vue de nez)
  • Un prix simple
  • Un process de vente efficace (réciprocité, présence)
  • Peu de coût matière
  • Pas de charge fixe

A-t-on vraiment besoin de manger des pralines sur la plage ? Non

A-t-il créé un besoin de praline ? Oui

Ce produit existe-t-il par ailleurs ? Oui

A-t-il de la concurrence ? Potentiellement oui mais son système est tellement huilé que je ne me risquerais pas à essayer de le détrôner. Et si quelqu’un essaye avec des produits moins chers …. je lui souhaite bon courage. 

Clientèle captive ? Presque

Son business a une seule limite : c’est lui qui le fait (parce qu’il aime ca, de son propre aveu). On pourrait imaginer une franchise sur toutes les plages… une extension nationale, un empire… mais non, à l’heure ou tout le monde rêve de grandeur et d’expansion, notre ami trace sa route.

Je m’étais amusé une année à calculer son chiffre d’affaires, cela tourne à 300€ par jour, à vue de nez. Avec une marge de 80%, ca laisse un peu plus de 7K par mois, sur 3 mois, soit quasi 2000 euros par mois sur 12 mois (en travaillant 1/4 de l’année). Le reste de l’année, m’a t il dit, il a une autre activité. 

Ca me fait penser à ce vendeur de couteau new yorkais qui habite Park Avenue et qui fait cela pour le plaisir.

Des mecs sains, qui maitrisent leur art et qui aiment les gens… What else ?

Image tiré de l’excellent film Glengarry Glenross…