Ne plus crouler sous les mails

Je travaille avec l’un de mes clients d’abord parce que son équipe est top et que le produit apporte une réelle plus value mais également parce que, l’ayant vu travailler, je me demandais comment il faisait pour gérer autant de sujets et demeurer disponible.

Et j’ai appris.

Ce dirigeant gère de près ou de loin 12 sociétés qui regroupent 250 personnes au final. Certaines ne lui prennent pas de temps, d’autres beaucoup plus (jusqu’à 60 personnes). Et, chose étonnante, il était toujours disponible quand je l’appelais, trouvait le temps de faire du sport…. Bref, occupé mais pas débordé.

Bref, en travaillant à ses cotés, j’ai beaucoup évolué dans ma façon de travailler, notamment sur le traitement des e-mails.

Comment fait-il pour gérer toutes ces boites et ne pas être submergé, à l’heure où justement, j’entends de plus en plus en souvent « je ne réussis pas à traiter mes mails » / « les mails sont une plaie » ?

Le secret ? Ne rien laisser trainer

Il a une façon radicale de traiter ses mails. Aucun mail en attente et il n’oublie quasiment rien (et pas besoin de le relancer). Sa boite mail est traitée instantanément.

En faisant quelques recherches, j’ai découvert que le cerveau est une machine à traiter. La mémoire à court terme est la région du cerveau que nous utilisons pour stocker toutes ces to-do que constituent les e-mails. En revanche, cette mémoire à court terme sait mal stocker des informations au delà de quelques secondes (comme penser à faire telle action, répondre à machin ou signer tel document).

Donc découverte 1 : notre cerveau n’est pas très doué pour travailler avec cette mémoire à court terme. Il n’est pas fait pour cela. Même avec la mémoire de travail, il n’est pas fait pour stocker des informations sur une période courte.

OK, sauf que lorsque nous regardons nos e-mails et que nous décidons de les traiter plus tard, c’est cette région de notre mémoire que nous utilisons. Nous oublions donc ce que nous devons faire et forçons notre cerveau à travailler d’une manière qui n’est pas naturel pour lui.

Du coup, ces interruptions incessantes que sont les e-mails sont contre-productifs. Pour pallier cela, il faut traiter sa boite mail 2 à 3 fois par jour, maximum. C’est ce que fait Daniel (le dirigeant dont je parle au début de cette chronique) et que je fais aujourd’hui. Chaque mail est soit traité immédiatement (et archivé, dans 95% des cas)) soit envoyé en todo (5% des cas). Il y a donc finalement 3 cas :

  • Cas 1 : il y a une action ou une question dans le mail qui prend moins de 2 mn
    • Ce que je faisais avant : je mettais le mail de coté, je regardais s’il y avait d’autres choses plus urgentes à faire et j’y revenais quand j’avais le temps. Du coup il y avait dans ma boite plein de mails comme celui-ci que j’oubliais parfois de traiter.
    • Ce que je fais aujourd’hui : je signe et renvoie dans la minute. J’archive le mail ensuite et je passe à autre chose.
  • Cas 2 : il y a une action qui prend plus de 2 mn (exemple : On me demande un retour sur un contrat / lire un document)
    • Ce que je faisais avant : je mettais le mail de coté, je regardais s’il y avait d’autres choses plus urgentes à faire et j’y revenais quand j’avais le temps. Du coup il y avait dans ma boite plein de mails comme celui-ci que j’oubliais parfois de traiter.
    • Ce que je fais aujourd’hui : j’envoie le mail dans ma todo tel quel, sans le prioriser. Et sans répondre. Autre option : je le laisse dans ma boite de réception.
  • Cas 3 : On me demande une décision.
    • Ce que je faisais avant : je réfléchissais au sujet, je me demandais si c’était la bonne décision, du coup je mettais le mail en attente pour renvoyer la réponse plus tard.
    • Ce que je fais aujourd’hui : J’évalue le risque et l’enjeu, je prends la décision et la communique. Je n’hésite pas 1 heure : de toute façon je ne prendrai pas une meilleure décision. Comme le dit coach François « si tu ne réussis pas à prendre une décision, c’est que le sujet n’est pas mature ou que des informations te manquent. » Si le sujet n’est pas mature et que je suis le décisionnaire, je réponds que je ne prends pas de décision. S’il y a d’autres personnes à mettre autour de la table, ça part en todo (cas 2)

Donc avoir une boite mail à zero est possible : j’y arrive.

J’ai ensuite instauré des règles, reprise de Daniel dans ses sociétés :

  • aucune copie cachée
  • les messages en copie ne sont pas lus
  • les messages transmis ne sont pas lus

sur cette dernière règle, j’avoue avoir eu du mal. Le cas s’est présenté plusieurs fois : transférer un document avec un résumé en disant : quelle est ta décision ? m’a valu un retour direct (« pour mémoire, je ne lis pas les messages transférés »). Et du coup j’ai trouvé un autre moyen : lors d’un échange prévu, j’ai abordé le sujet et ai eu le retour. Plus rapide qu’écrire le mail.

Et là vous me direz : oui mais ca marcherait pas dans mon entreprise parce que… et bien je ne suis pas d’accord.

Ca marche partout.

C’est une question de discipline et d’expliquer les règles du jeu aux interlocuteurs. L’e-mail en entreprise a 20 ans et on a donné un outil avec des fonctionnalités (comme le transfert ou la copie cachée) qui ne sont ni utiles ni pertinents. Je ne vois pas pourquoi on continuerait de les utiliser. On a bien réussi à supprimer cette habitude idiote qui consistait à mettre des accusés-réception à chaque mail. Faisons de même avec le transfert et la copie.

Autre tendance : le mail devenant l’arme du « Cover Your Ass »

Dans les grandes entreprises, je remarque la tendance suivante : j’ai écrit un mail, donc je me dédouane. Généralement c’est un mail « copie la terre entière ». Rien de mieux pour inonder les boites. Je dinais hier avec le dirigeant d’une grosse boite industrielle cotée. Lui aussi a cette règle : message en copie ==> directement à la corbeille. Je pense (et appelle de mes voeux) que les messages en copies vont disparaitre…

Ce qui nous sauvera ? la nouvelle génération

J’ai l’occasion de parler souvent devant des parterres de dirigeants de la génération des Millenials et des (nombreuses) différences de comportement. Ils ont cet avantage de privilégier la messagerie instantanée aux mails. Pour certains vieux cons de ma génération, la messagerie instantanée est un nouveau fléau. Je dirais plutôt que c’est une chance : celle de se libérer de ces boites mails obèses qui attendent qu’on les traite. En messagerie instantanée, pas de copie… et pas d’attente.

Dans une prochaine chronique, je partagerai une autre habitude acquise dernièrement pour le traitement des todos. Ca a été radical pour moi. Pas évident mais radical.

Allez, après ce long pamphlet, une petite vidéo en anglais pour se détendre :