Chef Brody

<attention, c’est ma catharsis. J’en ai besoin pour repartir d’un bon pied suite à l’épisode Covid. Je ne commente pas l’actualité, d’ailleurs pour rappel je ne regarde pas les infos. Aucune de ces chroniques ne parle d’actualité, on est là pour partager points de vue et expériences. Là, je partage une analyse et j’ai besoin de ton avis>

Chronique écrite en Juin 2020

En ce moment, je me sens comme Martin Brody au début des Dents de la Mer.

 

Tout le monde est dans l’eau. Le maire et tous les commerçants de l’ile d’Amity veulent faire la fête et oublier le passé. 

Et le bon chef Brody court comme un damné partout pour dire « sortez de l’eau, ça va saigner ».

 

Personne n’écoute Brody

Le requin a été pêché, tout est fini. Sauf que voilà… le requin pêché était petit, le vrai danger était toujours là.

Remplace requin par Covid, tu vois où je veux en venir. On ne parle pas de sanitaire, ce serait de spéculation (deuxième vague ou pas, ce n’est pas le point du tout, je ne suis pas compétent (d’ailleurs qui l’est vraiment ?).

 

Les amis, je la sens pas cette fin d’année 2020.  

Je rencontre deux catégories de gens :

  • Ceux qui sont inquiets (mais pas pour leur santé : 30 % des gens)
  • Ceux qui veulent reprendre comme avant et qui sont focalisés sur l’aspect sanitaire des choses (70%)

Cette dichotomie est assez impressionnante.

A cause du biais de confirmation, je collectionne les preuves d’un futur cataclysme économique sous forme de chiffres :

  • Seul 2,5% des entreprises qui l’ont demandé n’ont pas obtenu le PGE. Cela reviendrait à dire que 97,5% des entreprises sont bien gérées et donc capable de le rembourser ==> le taux de casse va être impressionnant
  • En ouvrant les vannes du crédit, le gouvernement a asséché le crédit aux entreprises. Pour les 18 mois à venir pas de demande de crédit de la part des entreprises. Les grandes entreprises ont augmenté leur nombre de crédit de 13% (source : https://www.banque-france.fr/statistiques/credit/credit/credits-par-taille-dentreprises) donc les banques n’auront plus de dossiers entreprises à traiter (les prévoyants ont pris le cash, c’est ce que j’ai fait). Bon, cela dit, pour une fois que l’argent inonde le marché et que les banques ne jouent pas avec pour leur propre compte, on ne va pas se plaindre.
  • Les entreprises ayant eu recours au chômage partiel sont légions. Ce chômage est souvent faux, beaucoup ont travaillé. L’état a subventionné la création d’entreprises Zombies (elles sont mortes mais ne le savent pas encore). Bon cela dit, elles allaient mourrir de toute façon, question de temps. Le Covid a accéléré les choses.
  • Un entrepreneur, pour investir, a besoin de visibilité (ou d’opportunités). Question visibilité, c’est très très limité. Opportunités, ce n’est pas pour tout de suite (cf ci dessous). Tout cela n’incite pas à la dépense. On garde la trésorerie, moins d’investissement. 
  • Le télétravail a montré à ceux qui hésitaient encore que bosser de chez soi est tout à fait possible. L’impact sur l’immobilier de bureau va s’en ressentir, surtout que les entreprises vont avoir besoin de limiter les frais. J’en croise pas mal qui songent à vendre leurs bureaux
  • Si les entreprises ne voyagent plus, une partie énorme du tourisme s’effondre, incluant les restaurants et leurs millions d’emplois directs et induits
  • C’est la fin du voyage à bas prix (un Paris New-York à 300 €, non sens écologique comme économique, c’est fini). Seuls les plus riches vont continuer de voyager.
  • Automobile
    • 41% des immatriculations en 2019 viendraient des entreprises. Les voitures n’ayant pas trop roulé et les contrats de LOA ayant pour la plupart été prolongés de 6 mois, le délai de renouvellement sera repoussé d’autant
    • Les loueurs de voitures représenteraient 10% du marché. Les voitures n’ayant pas roulé, peu de chance qu’elles soient renouvelées
    • ==> donc 50 % du marché vient de s’effondrer, après des résultats 2019 records, il y a donc sur-production
    • Ce qui est très étonnant, ce sont les concessionnaires qui font un mois de Juin excellent avec des chiffres de vente qui explosent sur le marché particulier. Pour moi c’est la preuve que le particulier français ne s’inquiète pas (sinon il aurait repoussé ses achats). L’effet Dents de la mer :  » le danger est derrière »
  • Marché de l’aéronautique
    • Entre la fin des courts courriers et les faillites de compagnies, Airbus n’a prévu un retour à une certaine activité avant 2022. Les équipementiers (nombreux) vont trinquer aussi. Pas de retour au niveau de 2019 prévue avant … 2025
    • L’age moyen chez Airbus est élevé, les départs à la retraite non compensés vont être nombreux
    • Les équipementiers (qui n’ont pas l’accès aux finances et qui ne sont pas « too big to fail » vont prendre très cher)
  • Embauches
    • La plupart des entreprises ont gelé les embauches (même dans les Telcos qui pourtant ont bien tiré leur épingle du jeu)
    • Il y a fort à parier que le gouvernement va assouplir les départs à la retraite (exemple : c’est exactement ce que l’ile Maurice a fait). Cela permettra de faire un coussin d’amortissement
  • Le FMI table sur une baisse du PiB mondial de 4,9% (et de xx% en France) (https://www.lesechos.fr/monde/enjeux-internationaux/en-direct-24-juin-coronavirus-le-point-sur-la-situation-en-france-et-dans-le-monde-1218243

Donc je résume :

  • En préambule : La question de « qui va payer tout ça ? » parait bien secondaire. On a fini de m’expliquer que l’argent se créait ex-nihilo, il n’est pas en quantité limité (surtout depuis que les monnaies ne sont plus indexées sur l’or). Il est clair que trouver le financement ne sera pas le problème. Les déficits vont se creuser, c’est tout. La BCE fera du Quantitative Easing à gogo (explication ici de ce mécanisme en 3 minutes)
  • Sur le secteur bancaire : moins d’opérations de crédit aux entreprises et moins d’immobilier d’entreprise. Où vont ils aller chercher la croissance ? Marché action ? (Pas sûr, car, hormis les Gafa je pense que personne ne va faire une bonne année). Marché obligation ? Vu les taux d’intérêt et l’accès au crédit des entreprises via les plans d’aide, c’est peine perdue. Franchement je ne vois pas trop l’avenir de ce secteur. La dernière fois qu’ils ont été créatifs ça nous à coûté une blinde (subprimes). Il vaudrait mieux qu’ils ne soient pas trop créatifs.
  • Sur le secteur immobilier : l’immobilier de bureau devrait avoir plus d’offre que de demande. Le marché particulier va également prendre du plomb dans l’aile avec les baisses de revenus et le chômage. Le locatif va devenir compliqué. Je vais attendre que ca sente mauvais pour y aller.
  • Pétrole : avec les stocks accumulés (on n’arrête pas un puit de pétrole, ils ont tourné pendant 3 mois) et le ralentissement de l’économie, le prix ne devrait pas s’envoler. La baisse de l’aérien ne va rien stimuler. Les déplacements étant moins nombreux, la demande va être beaucoup moins vigoureuse.
  • Aéronautique et Automobile vont connaître de sérieux plans sociaux (tabler sur 30% de réduction d’effectif d’ici fin 2020)
  • Le tourisme d’affaire va reprendre tout doucement, avec 6 mois de perte à la clef (3 mois de confinement et 3 mois d’été ). Les entreprises du tourisme ayant des marges courtes, il va y avoir de la casse. Je ne vois pas comment, avec 6 mois de CA en moins, cette industrie va pouvoir tirer son épingle du jeu. 
  • Et ceux qui vont trinquer, comme souvent, ce sont les pauvres. Ceux qui n’ont pas pu télétravailler, ceux qui ont pris des risques, qui ne sont pas encore prêts pour le digital et qui sont dans l’eau parcequ’on leur a dit que le danger était écarté.

Et parce qu’il faut être optimiste et réaliste, regardons les opportunités

  • Rester loin de la Bourse pour l’instant. Mondialement, elle est décorélée de la réalité (le marché fait ce qu’il veut et il t’emm…). Quand tout le monde aura bu le bouillon, il sera temps d’y revenir.
  • Les hôtels mal gérés (vieillissant et sans cash) seront à vendre. Ca va continuer à assainir (je sais c’est moche à dire, mais on le constate trop souvent)
  • L’immobilier de bureau sur Paris. Transformé en hôtels. 2 ans pour les construire, ça sera la fin de la crise (et les JO de 2024)
  • L’Externalisation. Entre comprendre que le télétravail fonctionne et externaliser une activité, il n’y a qu’un tout petit pas. Les entreprises vont le franchir pour des raisons évidentes de coût
  • Le médical. Avec le coup de projecteur sur la santé, il y a fort à parier que les labos seront des valeurs à suivre (surtout celui qui trouvera le vaccin)
  • Les 2 roues. Les citadins ne veulent plus prendre les transports. 
  • Les résidences secondaires (qui avaient du plomb dans l’aile) et les zones rurales devraient reprendre du poil de la bête
  • Le digital, qui tire extrêmement bien son épingle du jeu (les 5 plus grosses market cap sont aujourd’hui digitales)
  • Les drones et autres moyens de livraison « Green » autonomes
  • La formation à distance. Il va falloir former beaucoup de monde pour se ré-inventer.
  • Le gouvernement devra faire son New Deal
  • Et là j’attends tes idées, et réflexions.

 

Ce qui est certain c’est que grâce au covid (oui j’ai écrit grâce) la digitalisation de l’économie et les transformations de rupture vont se faire à un rythme accéléré.

En échange de fonds, les gouvernements vont demander des évolutions au pas de charge.

 

Plutôt qu’une guerre mondiale (arrivée après la dépression des années 30), parions sur une révolution technologique. L’ancienne génération qui ne voulait pas du digital va être mise à la retraite. À la nouvelle de faire le changement.

 

Et comme disait Chef Brody